Flambée des prix de l’huile d’olive en Algérie : Un marché prometteur en suspens
Le marché international de l’huile d’olive est actuellement en proie à une flambée des prix sans précédent, résultat des effets dévastateurs du changement climatique et de la sécheresse qui ont durement touché les principaux pays producteurs du bassin méditerranéen.
En août dernier, les prix de l’huile ont augmenté de manière spectaculaire, avec une hausse de 130 % en un an, atteignant en septembre le montant de 8326 euros la tonne.
L’Espagne, premier producteur et exportateur mondial, a également ressenti cette poussée des prix, avec une augmentation de 42 % depuis le début de l’année, portant le litre d’huile d’olive à plus de 10 euros. La production espagnole a chuté de 50 % l’année précédente, atteignant seulement 650 000 tonnes d’olives récoltées, selon le site Reporterre.
On pourrait penser que cette flambée des prix serait une opportunité en or pour l’Algérie, mais la réalité est tout autre. Dans une récente interview accordée à TSA, Hakim Alileche, un producteur algérien d’huile d’olive sous la marque Dahbia, qui a déjà reçu 22 médailles internationales, a expliqué pourquoi l’Algérie ne parvient pas à tirer profit de cette flambée des prix sur le marché international pour augmenter ses exportations.
La flambée des prix de l’huile d’olive à l’échelle mondiale est-elle due à une conjonction de facteurs ?
La flambée des prix de cette année est essentiellement le résultat d’une production en forte baisse, en particulier dans les grands pays producteurs du bassin méditerranéen, tels que la Grèce, l’Italie, l’Espagne et la Tunisie, entre autres. Cette augmentation vertigineuse est attribuable au changement climatique et à la sécheresse qui ont gravement affecté la production d’olives. En Italie et en Tunisie, où je me suis rendu récemment, la production d’huile d’olive a chuté de plus de 50 %.
En Italie et en Tunisie, où je me suis rendu récemment, la production d’huile d’olive a chuté de plus de 50 %
La presse espagnole rapporte également une diminution de plus de 50 % de la production. Parallèlement, la demande a explosé. Depuis la crise sanitaire liée à la Covid-19, les consommateurs asiatiques, en particulier les Chinois et les Indiens, ont augmenté leur consommation d’huile d’olive. La demande internationale a ainsi doublé.
Les exportations algériennes d’huile d’olive demeurent en deçà de leur potentiel. Les chiffres de l’Agence Algex indiquent que la valeur des exportations algériennes d’huile d’olive n’a pas dépassé 1,88 million de dollars en 2021, pour une production de 600 000 tonnes. Pourquoi l’Algérie ne parvient-elle pas à profiter de cette flambée des prix pour augmenter ses exportations ?
La Tunisie, produit 20 fois plus d’huile d’olive que l’Algérie
La Tunisie, qui produit 20 fois plus d’huile d’olive que l’Algérie, exporte 80 % de sa production, dont près de 50 % est conditionnée, ce qui lui confère une meilleure valeur ajoutée. Les producteurs algériens doivent s’affranchir des pratiques oléicoles anciennes héritées de nos ancêtres. Actuellement, les olives sont laissées à l’extérieur après leur récolte pour mûrir excessivement avant d’être triturées.
Les exportations algériennes se limitent à un petit marché de niche constitué principalement par notre diaspora à l’étranger, ce qui est manifestement insuffisant. Pour augmenter nos exportations, il est impératif d’accroître la production et d’améliorer la qualité. Le passage à des plantations intensives est nécessaire, car le parc oléicole algérien actuel est insuffisant.
Il est essentiel de standardiser nos pratiques de production pour garantir une meilleure qualité, en suivant les directives du Conseil oléicole international. Cependant, l’effort ne doit pas reposer uniquement sur les producteurs. Il est tout aussi crucial d’éliminer la bureaucratie au sein de l’administration locale.
Le gouvernement algérien déploie des efforts massifs pour soutenir la filière oléicole, avec un soutien visible envers les oléiculteurs. Les hautes autorités ont émis des instructions en faveur du secteur, mais il subsiste un écart entre les intentions et la mise en œuvre locale. De plus, des investisseurs peu scrupuleux ont acquis des terres agricoles, reçu des aides et des subventions, puis les ont abandonnées. Pour progresser, il est impératif de supprimer ces obstacles bureaucratiques.
La campagne de récolte oléicole est sur le point de débuter en Algérie. Quels sont vos rendements prévus pour cette saison ?
Les rendements en fruits sont dans l’ensemble moyens cette année. En mai dernier, nous avons été confrontés à des températures nocturnes anormalement basses, qui ont freiné la circulation de la sève dans les oliviers. Lorsqu’un arbre est stressé, il subit un avortement. Ce phénomène a eu un impact sur notre production, et ces variations météorologiques sont en partie liées au changement climatique et à la sécheresse.
La marque d’huile d’olive Dahbia a déjà remporté 22 médailles internationales. Pouvez-vous nous parler de vos nouveaux produits ?
Nous continuons de miser sur le segment haut de gamme, en produisant de l’huile d’olive vierge extra de haute qualité. Nous privilégions la récolte précoce pour garantir des vertus biologiques exceptionnelles et une qualité ultra-premium. Cette année encore, nous maintenons cette approche avec des huiles d’olive à l’arôme fruité vert, obtenues par une trituration rapide après la récolte.
À l’avenir, nous envisageons de diversifier nos produits. Avec nos extensions, nous prévoyons de produire de l’huile vierge, dont le rendement est plus élevé, ce qui permettra de rendre nos produits plus accessibles. Actuellement, 100 kilos d’olives produisent 7 à 8 litres d’huile vierge extra, mais si nous laissons mûrir les olives jusqu’à janvier, nous pouvons obtenir jusqu’à 24 litres d’huile vierge par quintal d’olives.
Quels sont vos projets d’expansion pour vos oliveraies ?
Le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, lors de nos discussions, a exprimé son accord de principe pour nous octroyer 250 hectares de terres en vue de la plantation de 300 000 oliviers. Nous espérons obtenir ces terres d’ici la fin de l’année ou au début de l’année prochaine, dans la wilaya de Djelfa et ailleurs. Par ailleurs, avec un partenaire, nous avons lancé un projet de production d’huile d’olive sur 50 hectares de plantations dans la wilaya de Mostaganem.
Nous sommes prêts à soutenir de nouveaux investisseurs dans ce secteur en partageant notre expérience. Notre objectif est de favoriser le développement de la filière oléicole en Algérie.